Les Jardins d'Opale
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[Guilde] Discordia, les tribulations d'une apprentie Déesse

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[Guilde] Discordia, les tribulations d'une apprentie Déesse Empty [Guilde] Discordia, les tribulations d'une apprentie Déesse

Message par Maitre du Jeu Mar 29 Nov - 14:48


Chapitre I
Au commencement il y avait ...


L’âme d’une grande déesse, puissante, charismatique, belle, mégalomane et, de facto, à l’ambition dévorante. Il était donc fort dommage de n’être … qu’une âme justement. A l’origine, il y avait donc une âme errante, pas encore décidée sur sa prochaine incarnation, car qui voudrait être le disciple d’une divinité usurpatrice quelconque quand on est soi-même LA divinité suprême ? Il n’était pas acceptable que dans sa grandeur, sa grâce, son aura, sa puissance, en un mot, son ELLE, elle puisse se résoudre à cet avilissement suprême !
Les dieux, ces personnages imbus, hautains, puissants et inaccessibles tels qu’elle rêvait de l’être, eux qui lui avaient ri au nez vaporeux quand elle avait demandé de s’incarner en déesse plutôt qu’en disciple de l’un d’eux, ne perdaient rien pour attendre ! Elle serait leur égale juste avant de les massacrer tous, devenant LA déesse unique priée et adulée par tous, instaurant SON culte sur le monde des … ben de la Une justement, et sans besoin de faire de la publicité ! Sans besoin d’informer les gens sur les petits métiers obscurs et oubliés au fin fond des campagnes les plus reculées, en clair, par la seule puissance et force de la croyance et du regard de ses « déespectateurs » !

A force d’y réfléchir (quand on n’a pas de corps, on a vraiment que ça à faire …), elle décida de ne pas s’incarner du tout sous les traits d’un de ces grossiers simili dieux et préféra voleter de ci de là, cherchant une solution à son état éthéré, certes passablement sexy mais d’assez peu de poids quand on a pour intention de faire créer un culte à la Gloire de Soi Même. La solution idéale, pour en avoir entendu parler dans les sphères limbiques dans lesquelles elle gravitait (sphères hautes certes mais fort peu compactes), était d’arriver à posséder d’un corps suffisamment intéressant pour en prendre le contrôle et manœuvrer gaiement et bien au chaud dans le propriétaire originel. Hélas, quelle que soit l’ambition et la motivation dont on fasse preuve, quand on n’a aucun pouvoir et qu’on reste, somme toute, une simple âme vagabonde, arriver à manipuler une âme bien en place et ayant choisi son sort n’est pas chose aisée.

Prudente et n’acceptant pas l’échec, celle qu’on allait nommer « La Dame » pendant quelques temps, jeta son dévolu sur des choses simples à « hanter », changeant souvent de lieu jusqu’à en trouver un qui lui convienne et puisse servir ses desseins. Elle hanta nombre de choses inanimées. Le 4eme barreau de l’échelle en partant du bas d’un paysan Amaknéen fut un mauvais choix : se faire marcher dessus sans ménagement quand on a l’ambition d’être LA déesse unique, il aurait fallu se douter que ça ne cadrerait pas. Avant que le barreau ne lâche, elle retourna à son état d’errance et opta pour la corne droite d’un Bouftou anonyme. Tellement anonyme qu’elle n’eut que le temps de s’envoler au moment ou un aventurier sanguinaire trancha sans ménagement son logement puant. Agacée par le manque de résistance de son choix précédent, sans compter l’odeur à faire frémir les sens les plus coriaces, elle jeta son dévolu sur un mulou sauvage. Las, encore assez peu expérimentée dans l’art délicat de la possession de corps, le mulou se rebella et elle se retrouva propulsée de la boite crânienne à l’ongle de l’auriculaire de la bestiole, place avilissante et totalement inutile s’il en est. Dépitée de ses nombreuses expériences calamiteuses dont nous ne ferons pas mention ici, elle finit par s’installer dans une ficelle de lin, se disant que là, au moins, elle pourrait peut être finir en corde à pendu et être l’instrument de la mort des mécréants de tous bois qui avaient l’audace de ne même pas croire en elle. Elle s’enroula sur elle-même, essayant d’éviter les nœuds, et le temps passa …


Chapitre II
« Boite crânienne libre de suite, affaire à saisir »


Nul pendu, nulle exécution même sommaire dans les environs, pas même un chienchien de bourgeoise à promener pour des besoins très naturels et ayant besoin d’un lien pour l’empêcher de s’en aller trop loin … Ceci dit, être une ficelle de lin sous la table d’une taverne miteuse d’Amakna, ne permet pas forcément de hauts faits de justice divine (ou de simples actes de banalité), et l’âme s’ennuyait. Faute de corde à pendu (plutôt fabriquées en chanvre d’ailleurs, mais ça, elle l’ignorait) une femme d’arts et de chants vint à casser une corde de sa lyre et la remplaça à la hâte par le premier bout de ficelle qui trainait par-là : un bout de lin hanté par une Déesse en devenir qui lutait chaque jour contre les coups de balais aléatoires du tavernier heureusement peu maniaque.

Ô divine providence ! Enfin un objet permettant de faire retentir sa voix et ses idées, enfin un moyen de sortir de l’ombre devant les yeux adorateurs de ses futurs disciples !! Au travers de l’instrument et de la voix de Schamel la ménestrelle (puisque c’était le nom de la pauvre jeune personne détentrice de l’instrument), ses enseignements, ses désirs, ses préceptes allaient enfin trouver un moyen de recouvrir le monde plus sûrement qu’une corne de bouftou échangée contre un parchemin de sagesse. La jeune femme n’était pas particulièrement maligne, de par le fait, il serait facile de posséder cet esprit qu’elle n’avait pas.
Il allait cependant falloir jouer serré (du gâteau pour une ficelle !), car si la jeune ménestrelle chantait relativement bien, si sa voix était claire et envoûtante et son physique assez agréable, jamais elle n’arriverait à avoir le charisme et toute la magnificence de celle qui faisait vibrer sa lyre depuis quelques jours. Le son des accords que la lyre semblait trouver seule était cependant envoûtant et tellement tentateur qu’on finissait par s’en oublier soi même. Tellement s’en oublier que Schamel sembla bientôt tout à fait prête et réceptive. La Dame décida donc qu’il était temps, son âme abandonnant sa ficelle de lin un peu trop urticante afin d’aller s’installer bien plus confortablement dans le corps prometteur offert et d’ores et déjà dévoué.

Réceptive, de prime abord, car même l’âme la plus simple apprécie fort peu les intrusions sans annonce via bristol (quand bien même divins). Il faut savoir qu’une âme n’aime pas la concurrence et que quand elle choisit une incarnation, elle apprécie fort peu qu’on vienne la déranger dans son nouveau lieu de résidence. De nombreuses altercations entre les deux âmes s’en suivirent, sans dire innombrables mais ceci dit assez violentes pour qu’elles soient notables. De discussions stériles en argumentaires fallacieux, de grognes en tous genres en atermoiements mielleux, les âmes s’amadouèrent (enfin, surtout celle de La Dame qui part ses mots bien choisis, lui permirent de s’ouvrir une porte dans l’esprit de la ménestrelle).
Cette dernière, passant déjà pour assez faible intellectuellement parlant, fut un temps la risée de ses contemporains quand des monologues avec elle-même lui prenaient. Elle râlait, criait, tenait des propos absurdes disant tout et son contraire, semblant même se battre physiquement contre elle-même à certains moments. D’aucuns se demandaient même si elle n’allait pas finir par se frapper vraiment tant elle semblait contester et contre argumenter ses propres propos, attendant presque avec espoir le moment ou elle se balancerait sa propre chope de bière au visage.
Elle aurait pu effrayer les gens qu’elle était venue divertir dans les auberges, mais sa façon d’être et ses gestes aléatoires à la limite de la ventriloquie finissaient par amuser les spectateurs plus qu’ils ne les inquiétaient. A défaut d’angoisser ses semblables, elle fit donc un début de promotion prometteuse à La Dame qui tentait de négocier le gîte et le couvert dans un crâne suffisamment vide pour héberger une ou deux familles de réfugiés Brâkmariens en exil.

Après quelques jours, la Dame estima cependant qu’il était plus prudent qu’elle manipule dans l’ombre intérieure pour plus de radiance extérieure. Prudence étant mère de sûreté, elle joua plus finement et arriva à ses fins (faute de posséder à sa faim) : hantée, colonisée, Schamel ne se rendit jamais vraiment compte de rien consciemment, trouvant simplement qu’elle ne chantait que mieux avec cette nouvelle lyre, que les gens semblaient fascinés par ses paroles, paroles nouvelles dans lesquelles se mêlait une croyance émergente en une déesse bonne, douce, à l’écoute des humbles et moins humbles. Une déesse qu’il ferait bon de suivre contre les fanatiques de tous bords, déesse qui promettait chaque jour un peu plus la joie, la liberté et la paix pour qui marcherait sous son manteau protecteur.
Dès qu’elle eut fini de se battre contre son nouveau « elle », ses récitals attirèrent de plus en plus de monde, ses paroles sonnant tellement justes aux oreilles des petits et des oubliés des dieux qu’elles n’en avaient que plus de poids. La propagande s’amorçait et la Dame buvait du petit lait tout en dispensant le fiel qui allait servir à sa gloire.


Chapitre III
Vers la déification et au-delà !


Je suis venue à vous afin de vous révéler la vérité, moi déesse descendue parmi vous pour vous sauver et vous apporter le bonheur et la paix. Amaknéens, Amaknéennes, les dieux vous mentent !! Les dieux vous spolient !! Osez vous rebeller contre ces affameurs qui ne pensent qu’a leur profit et leur place dorée, osez la révolte contre les dirigeants des cités et leur politique égoïste ne les favorisant qu’eux et leurs salles guerres de rivalité pour la prédominance d’une Cité sur l’autre !! ». Ainsi commença un des récitals de Schamel, dont la voix portée par les accords mélodieux de la lyre et de la Dame ne pouvait que s’imposer à tous. La taverne était bondée à cause d’un orage inattendu, et la Dame, dans sa ficelle de lin, passa à l’attaque, dictant ses mots à la ménestrelle. De la plus humble ménagère trempée et pressée de rentrer s’occuper de son foyer, au plus riche commerçant énervé revendiquant encore une fois la revalorisation du prix de la corne de bouftou, tous firent peu à peu silence. Envoûtés par la mélopée quasi céleste, bercés par les paroles si justes et harmonieuses, chacun en oublia ses soucis et ses tracas (bien réels) pour ne se concentrer que sur ceux dont La Dame parlait. Chacun fit sienne les revendications si véridiques (et qui pourtant ne leur posaient aucun problème la minute d’avant) et un vent de colère contre les puissants se mêla à l’enchantement d’être enfin entendus.

Enfin, pour être tout à fait honnêtes, aucun dieu n’aurait jamais pu entendre les revendications du peuple pour la bonne raison que personne n’avait jamais trouvé à redire ou à se plaindre : la guerre ça fait marcher le commerce et sa soulage parfois de maris un peu trop encombrants. Ceci dit, plus personne dans la salle ne pensait plus aux avantages, trop heureux de pouvoir dire qu’eux avaient une déesse pour eux tout seul, qu’elle existait parce qu’ils l’avaient rencontrée ! La liesse ne cessa plus, et dans chaque taverne ou auberge visitée la foule grossissait dès que retentissait le dernier couplet du récital : « Croyez en moi, suivez-moi, priez moi et je vous promets la joie, la sérénité, la paix et mieux encore dès que j’aurais pris possession de ce qui me revient : une place au panthéon doré afin de mieux vous servir et vous rendre heureux !! » Et brandissant sa lyre comme le poing rouge de la révolte populaire, elle plaquait un dernier accord accompagné de sa voix en vibrato clamant : « Au combat camarades !! C’est la lutte finaaaaaaaale !!!». La Dame avait toujours eu un peu de mal avec cette phrase, mais l’ironie et le mensonge éhonté qu’elle représentait la faisaient rire sous cape, ou du moins dans Schamel, ce qui était, somme toute, encore plus discret.

Si Schamel en avait eu le temps, son esprit possédé aurait peut être pu se dire qu’il y avait tofu sous craqueleur et que cette Déesse n’était peut être que le fruit de son imagination, ou une muse un peu trop présente et possessive (notons que sur ce dernier point, elle n’aurait pas eu totalement tort). Mais, maligne, La Dame décida de se « montrer » à sa logeuse un soir de Flovor 127, utilisant les méandres torturés et néanmoins un peu légers de l’esprit de cette dernière. Elle créa en elle une image mentale, projection chimérique d’une déesse digne de ce nom et dont la beauté n’avait d’égal que l’harmonie des formes. Comment s’y prit-elle ? Nul ne le sait vraiment (du moins, personne n’est venu le raconter afin que ça puisse être relaté ici). Sans doute l’esprit de Schamel était il réceptif et voulait-il voir cette déesse qui promettait de s’incarner devant les yeux ébahis de son Elue. Sans doute la Dame profita-t-elle de créer l’image que la ménestrelle voulait voir pour finir de croire en elle.
(Note du rédacteur : Il est à noter qu’un ancien chercheur Amaknéen nommé Planteur suggéra que l’esprit des êtres était capable de se projeter des images particulièrement réalistes des fantasmes et désirs de la personne. Ces images seraient, selon lui, peintes par des diablotins enfermés dans une boite en bois, sous les directives de deux des leurs qui regarderaient par un trou ménagé dans la boite. L’idée est totalement ridicule bien entendu, mais Planteur affirmait qu’il en était ainsi dans un autre monde que celui des 11 alors que sa théorie était tout à fait recevable. Il mourut en glissant dans son bain, alors qu’il essayait de faire tenir une assiette sur le dos d’une Atouin, elle-même surmontée de quatre koinkoins… Il y a vraiment des morts idiotes…)

A partir de ce moment, Schamel fut définitivement persuadée d’avoir affaire à une Déesse en chair et en os, ayant pris corps pour elle (si tant est que les dieux soient fait ainsi, mais ça, …). Schamel donc, la suivit, dévouée corps et âme (ici l’expression prend toute sa force et sa valeur, vous en conviendrez), suivant une Déesse montante, belle comme le jour, radieuse comme la lune, forte et fière comme elle-même avait toujours rêvé de l’être, une Déesse sachant galvaniser les troupes et inviter chacun à rallier sa cause. D’une, elles furent deux, tout au moins aux yeux de Schamel.
- Tu es mon Elue jeune femme, rends toi compte de l’incommensurable chance que je te donne d’être mon héraut, la figure de proue de Ma déification !! Et puis, de toute façon ...
- Oui, Grande Déesse, Ta voix sera ma voie et ton enseignement celui que je dispenserai au monde pour lutter contre ces vils usurpateurs qui …
- Oui, oui bon c’est moi qui fais les discours ici, tu es gentille, chacun son boulot.
Ainsi se déroula le premier échange « verbal » entre la ménestrelle et celle qui allait sans aucun doute faire sa place au panthéon des dieux en deux tours de ficelle de lin.
Le terme de déesse n’était cependant pas totalement approprié, puisque la Dame n’était reconnue par aucun dieu du monde des 11. Mais là était justement toute l’audace et le machiavélisme du plan : manipuler le peuple, lui faire croire en elle suffisamment fort pour qu’aucun des 11 dieux ne puisse jamais plus lui refuser SA place à leurs côtés (évidemment, elle les éradiquerait par la suite tous l’un après l’autre, mais chaque chose en son temps).

Ainsi commença le culte de la Dame dès l’année 127, ainsi rallia-t-elle des fidèles, quasiment malgré eux. Elle ne pouvait décemment pas leur dire qu’elle se fichait d’eux comme une rose démoniaque de sa première bave, que son seul et unique but était d’accéder à ce panthéon chéri que ces dieux fantoches lui refusaient, pour de simples soucis administratifs d’inscriptions et de quotas sur les registres de fidèles veules et rampants. Mais dans sa folie, elle savait bien qu’il fallait jouer sur l’espérance des gens : ils adorent entendre dans la bouche des autres ce qu’ils n’osent dire eux-mêmes et le premier éleveur de bouftous venu pourrait fort bien engendrer un troupeau d’adeptes (restons dans l’image des troupeaux simples d’esprits) pour peu qu’il sache s’y prendre.
Et c’était son cas ! Car si elle n’avait aucun pouvoir spécifique, c’était une oratrice de génie, et aidée par la voix mélodieuse et envoûtante de Schamel, ses paroles n’en avaient que plus de poids. Elle avait aussi un don pour trouver les mots, pour lire le cœur des hommes, leurs espoirs secrets et leurs aspirations les plus tenaces. La plèbe voulait être libre, elle en avait assez de la guerre, de la peur, de la soumission ? Qu’à cela ne tienne, elle allait leur en donner ! En paroles évidemment, mais s’il y avait du monde pour y croire, c’était le principal.


Chapitre IV
Qui joue de la Lyre récolte la Discorde


Et le peuple y crut, tant et si bien qu’à chaque apparition, manifestation, exhibition de cette apprentie déesse, la foule se faisait plus nombreuse, plus fanatique, plus soumise et irrémédiablement conquise par celle qui leur promettait tant de merveilles au regard de leurs vies médiocres, critiquant ouvertement les dirigeants de tous bords, de toute faction, de tous dieux. Des pamphlets railleurs fusaient à chaque nouvelle affiche contestataire placardée, à chaque nouvelle chanson ou allocution, et les petites gens aimaient ça, ils aimaient entendre critiquer les grands et les puissants et suivirent aisément celle qui en était l’instigatrice.

Durant une année et demie, les rangs grossirent, suivant celle qu’on appelait toujours « La Dame » jusqu’à ce fameux jour de Fraouctor 128 ou un nom lui fut donné, un nom tellement évidement qu’elle fut étonnée de ne pas y avoir pensé seule. Installés depuis quelques temps dans les plaines de cania, la troupe se déplaçait en roulottes, comme des prêcheurs qu’ils étaient, faisant des récitals où l’envie leur prenait, invitant tous et toutes à venir assister au miracle de la déesse descendue parmi eux, riches ou pauvres, notables bourgeois et petits paysans. La nuit tombée, certains d'entre eux allaient à Bonta, placardant des affiches moqueuses, insultant ces "héros de guerre", piétinant leurs grades un peu inconscients à cette époque que tout cela était provoqué par les paroles de La Dame qui leur donnait du courage à revendre. Chansons grivoises sur les généraux, théâtres d'improvisation dans les rues de la cité, poèmes absurdes sur la guerre tout était bon pour se moquer. La Dame avait fait d’eux tous ses amis, ses enfants, ses neveux et nièces. Ses fidèles auraient dévoré le monde pour elle.

Agacés de voir leurs murs blancs constellés de tracts injurieux (mais néanmoins vrais) et proclamant la vérité de l’illustre inconnue, les Bontariens décidèrent d’aller lancer des propos diffamatoires, menacer et accuser des pires maux ce regroupement de campeurs et cette empêcheuse de pacifier en rond (comme si on n’avait pas assez des cornus griffus rougeoyant du sud, non mais sans blagues !!). Brakmar, Amakna ainsi que les autres villes n’étaient pas épargnées par les tracts anti guerre et pro Dame, mais la cité blanche avait déjà bien assez à faire avec la cité des démons fanatiques et une petite troupe Bontarienne décida de mettre un terme aux répliques cinglantes et bien choisies de l’inconnue, les accusant tous de tous les maux : pacte avec Brakmar, insultes envers les héros, désobéissance vis à vis des protecteurs, semeurs de discorde !
Parmi eux, se détacha une jeune femme d’exception : Dame Fay-Ka Buzay. Une femme noble et chic s’il en est, issue de la haute bourgeoisie Bontarienne, mais passablement désabusée (le nom ne fait pas toujours tout), elle avait pris part à la délégation plus par curiosité et besoin de changement que par envie de faire cesser les troubles, qui égayaient son quotidien. Elle se détachait de la foule par son port de tête altier et ses manières délicates et nobles, cachant dans un délicat sac à main rose rehaussé de dentelle la plus fine et de pierreries de prix, les tracts qu’elle avait trouvés et gardait précieusement. Ce fut un choc pour elle de voir et entendre La Dame leur parler, elle resta subjuguée par les « saintes » paroles qui faisaient raisonner son cœur et ses aspirations les plus profondes.

"Discorde ? fit La Dame, et bien alors nommez-moi Discordia, reine de la Discorde ! Là où vous voyez de la discorde j'y vois de la liberté. Ce n'est pas nous qui désobéissons aux protecteurs, ce sont eux qui nous utilisent comme des esclaves. Avez-vous désiré cette guerre, savez-vous pourquoi elle a lieu ? Pourquoi vos fils et vos conjoints doivent y participer ? Pourquoi doivent-ils mourir ? Même les Dieux sont sourds à vos suppliques, les Onze ne vous méritent pas ! La seule chose insultante, ce sont vos chaînes vous retenant captifs ! Alors soit, si être Discordien c'est refuser ces chaînes nommez-moi Discordia !".

Accusations tellement vraies, mots tellement justes, qu’à leur arrivée dans le campement, chaque parole remua l’âme des détracteurs Bontariens et leur fit rapidement tourner cape, oubliant la cité et ses dirigeants pour suivre celle qu’ils étaient venus insulter. Cela donna lieu à des chants plus cinglants encore et une foule de fervents encore plus importante, belle réussite du camp Bontarien, il faut l’avouer... Dame Buzay quant à elle, resta la plus fervente et fidèle Discordienne de cette troupe nouvellement convertie, enfin libérée de l’étiquette, des conventions, des standards et de la bienséance, quoi qu’elle garde toujours ses tenues de prix et ses manières bourgeoises, son amour immodéré et l’œil vif concernant toutes les choses à la dernière mode : vivre en roulotte et dégrader les biens publics la faisait certes frissonner de plaisir, mais elle tenait tout de même à garder son standing et certaines de ses valeurs (comme par exemple ne pas porter de souliers blancs passé le 1er Novamaire, ou ne jamais sortir de sa roulotte sans maquillage, vêtements corrects et coiffure particulièrement recherchée : « Nous ne sommes pas des sauvages tout de même !! » se plaisait elle à répéter.


Chapitre V
Quand les Dieux s’en mêlent, les malédictions se mêlent


Mais si le culte prospérait, si la voix de Discordia commençait à raisonner plus fortement qu’avant, toujours plus écoutée et suivie, si au départ, les gens « subissaient » à l’improviste les récitals donnés par la « déesse », il arriva rapidement que les gens se pressent en masse dans l’auberge où elle était annoncée. Le phénomène était nouveau et presque décalé. Jusque là, les troubadours et ménestrels avaient plutôt pour habitude de chanter la gloire des cailloux et des cabanes au fond des jardins, ou d’alourdir l’atmosphère à l’aide de chansons mielleuses dans lesquelles ils larmoyaient de ne pas avoir changé et de toujours porter leurs mêmes chaussettes trouées. Avec l’arrivée de Discordia, les chants se firent plus intenses, le message plus fort et mobilisateur, dénonciateur également de la mal fonction du système et de l’abandon des dieux. Les gens sont toujours prêts à suivre qui leur proposait du changement, et en bon bouftous, suivent toujours ce que faisaient les autres. Ils attendaient donc avec une impatience croissante l’arrivée de leur nouvelle star, banderoles brandies prônant des « Discordia, je t’aime », distribuant des parchemins sur lesquels étaient retranscrits les préceptes et paroles assassines de ses chansons, certains vendant même des toges sur lesquelles était peint le visage de la déesse ou des tartines à la graisse de bouftou en forme de lyre. En résumé, un vrai fan club de disciples croyants et subjugués grossissait au fil des semaines, certaines femmes payant même des fortunes pour que les alchimistes tentent de leur modifier le visage à l’image de celui de Discordia (on assista à certains cafouillages assez malheureux, mais c’est une autre histoire).

Cet engouement et ces mots incendiaires présentaient cependant un net désavantage : une voix claire et forte porte parfois plus loin qu’on ne le penserait. Il arrive même, parfois, qu’elle atteigne des oreilles plus divines que la bouche qui en est l’origine, ce qui est parfait pour une prière, plus gênant quand il s’agit de critiques acerbes et de défis lancés à la face de ceux qui les entendent et en sont les objets.
Les dieux, puisqu’il s’agissait d’eux, apprécièrent très … moyennement cette petite âme errante qui voulait se prendre pour une déesse. Elle les avait déjà passablement agacés en refusant de choisir l’un d’entre eux, mais prêcher pour sa paroisse, c’était un affront de trop ! Se réunissant rapidement (parce que ça n’était pas non plus une affaire d’état), ils discutèrent de cette figure de discorde qui faisait surface depuis quelques temps. Osamodas convoqua ses acolytes afin de décider ensemble de ce qu’il convenait de faire. Assis sur le plus haut trône du panthéon (celui gravé d’images de dragons entremêlés), il tapotait son divin accoudoir en attendant que tous s’installent, soupirant une nouvelle fois aux agaçantes facéties de Sram. Ce dernier appréciait particulièrement de poser des pièges sur les sièges des convives, ce qui avait pour effet fâcheux de voir ces divinités guindées et sérieuses sauter de leurs trônes comme des tofus sur des glyphes enflammés. Glyphe que la déesse Feca finissait par lui poser sous les pieds, quand elle arrivait enfin à repérer où le dieu squelettique se trouvait. Se frottant l’arrière de la toge et tentant de remettre ses cheveux fumant en place avec agacement, Osamodas entama la discussion :

- Bon, on ne va pas y passer des siècles non plus, pas de quoi s’inquiéter de cette âme mégalomane qui réunit une poignée de crétins à sa suite. Ceci dit, on a assez de l’autre rouge cornu pour nous fatiguer les heures éternelles, pas la peine de laisser cette femelle prendre le même chemin.
- J’approuve pleinement cette nécessité, elle commence à se sentir un peu trop pousser le zèle, enchaina la déesse Eniripsa, occupée comme à son habitude à jouer avec les mots.
- Bah, lâcha Sram, les deux pieds dans une bassine d’eau divine afin de calmer les brûlures infligées par le glyphe, aucun de nous ne la soutient, personne ne lui accordera jamais de pouvoir, donc il me semble peu probable qu’elle rassemble assez de croyants pour la rendre vraiment dangereuse. Cette « croyance » s’éteindra d’elle-même, termina t’il en jetant un regard vide, quoi que passablement noir à la déesse Feca.
- Mais les temps sont troublés, interrompit Sadida furieux, alors qu’il utilisait ses poupées pour éteindre ses poils roussis par l’explosion d’un piège de masse intempestif. L’Aurore Pourpre est encore sanglante et douloureuse dans nos cœurs, le retour d’Hyrkul et la remontée croissante des fidèles de Rushu nous incident à être prudents. Il faut agir tant que c’est encore possible.

Au mot « agir », Iop sursauta, réveillé d’un coup. Il était étonnant de voir que son arrière train cramé n’avait pas provoqué une telle réaction. Afin de faire sérieux, il retint le mot qui lui montait du fond des tripes (à savoir : « BASTOOOOOON ») et opta pour une intervention plus digne d’un dieu en réunion de crise, réaction Iopesque tout de même (on ne se refait pas…).

- Faute de pouvoir éradiquer cet abruti de Rushu, défoulons-nous sur la mégalomane !! Aux épées !! J’en appelle au feu Céleste et à la Tempête Puissante !! Que se déchaine la Colère divine et que les Epées du Destin écrasent comme une vermine … Heuuu …, s’interrompit-il pour regarder de droite et de gauche ses pairs qui secouaient la tête d’un air affligé. Il faut tuer qui déjà ? On parle bien de ça non ??
- Vaguement, mais rendors toi on t’appellera quand on aura besoin ne t’en fait pas, laissa tomber la déesse Crâ, en lui cloutant le bec à l’aide d’une flèche d’immobilisation. Il ne s’agit pas non plus d’aller perdre du temps à intervenir pour de pareilles broutilles, on a mieux à faire.

Tous l’approuvèrent, se sentant motivés et ludiques pour imposer leur divine puissance et rire, puisqu’ils en avaient l’occasion, par Eux Tous ! La déesse Sacrieur avait pleuré le sort des habitants du monde des 11 et elle se disait que, la pauvre ménestrelle était certes assez légère cérébralement parlant, mais qu’elle ne méritait pas la mort pour autant : les disciples de Iops étaient bien vivants, eux !

- Pourquoi ne pas lui lancer un avertissement vocal pendant qu’elle s’adresse à ses « ouailles » histoire de la discréditer ?

Une fois de plus, tous approuvèrent, une intervention vocale c’était une bonne idée. Mais parler pour dire quoi ?

- Qu’on va lui casser la tête et qu’elle va être morte, morte, morte et remorte pardi !! lâcha Iop qui avait malheureusement retrouvé l’usage de la parole. Parole qu’il reperdit dans l’instant d’ailleurs, grâce aux efforts conjoints des mots de silence d’Eniripsa, du glyphe de silence de Feca (sur lequel il glissa en tentant d’attraper la déesse Eniripsa par les ailes) ainsi que des pièges de silence et d’immobilisation laissés là par Sram, qui se hâta de regarder ailleurs, cherchant hypocritement des orbites qui avait bien pu laisser trainer ces pièges.
- On a qu’a la maudire, grommela Xelor qui ne s’était pas encore exprimé, on ne va pas passer des heures à discuter, j’ai des horloges à régler moi et le temps ça ne se gâche pas.
- Dommage d'en arriver là, lacha fourbement Sram en coulant un regard de biais particulièrement ironique à la déesse Crâ. Ses formes avantageuses sont tout de même particulièrement divines.

Les regards se tournèrent discrètement vers le vide qui faisait office de décoleté au centre du torse de la déesse et quelques gloussement légers et étouffés fusèrent de ci de là. Crâ en fut ulcérée, comme chaque fois, et se drapa dignement dans sa cape, bombant le torse autant que possible dans une tentative desespérée d'afficher ce qu'elle n'avait pas à mettre en avant. Puisque c'était ainsi, elle participerait elle aussi à ces malédictions... à sa façon.

- L’idée me parait tout à fait recevable, dit Osamodas en souriant, après les hochements de têtes approbateurs des autres divinités. Mais comme le dit Xelor, inutile de faire ça nous-mêmes. Choisissez chacun un représentant qui se chargera de répéter nos divines paroles à cette femelle. Sadida, je te charge de t’occuper des envoutements nécessaires à leur accomplissement.

Ils se séparèrent, et chacun donna autorisation à un proche de confiance pour s’exprimer en son nom, sur le moyen de communication divin habituel, une espèce d’appareil inconnu et magique, décuplant le volume des voix s’y exprimant (avec un léger écho, juste pour le côté mystique).
La décision avait été prise : ils allaient la maudire, et comme les dieux ne font jamais rien à moitié, ils allaient même la maudire trois fois, pour être surs qu’elle se tairait une fois pour toute, discrédité aux yeux de ses pathétiques suivants. De véridiques, ses paroles allaient devenir ridicules, de mélodieuse et envoutante, sa voix allait être dissonante et discordante (tiens, comme son nom ! Comme quoi, y’a pas de hasard, c’est l’ineffable du divin ! ), de belle et harmonieuse, sa silhouette allait devenir grotesque et loufoque.


Chapitre VI
Les voix des Dieux sont dans l’escalier et Discordia gagne un bonnet W


Les représentants, choix difficile s’il en est car les dieux ont tendance à être particulièrement paranoïaques, ils ont donc très peu d’êtres de confiance autour d’eux, et un léger malaise pouvait se sentir dans chaque divine demeure au moment de se décider. Dans la mesure du possible, chacun choisi, par sécurité, un messager qu’il pouvait générer lui-même et n’ayant d’existence propre que celle que son maître voulait bien lui accorder.

Sram choisi son double apprenti, un commis qui l’assistait dans son labeur quotidien, un double du nom de Morty. Il avait hésité avec son maître d’hôtel Albert, mais le petit avait besoin de faire ses armes et d’apprendre le métier.

Enutrof envoya son coffre personnel, un coffre amélioré doté de 1000 pattes ce qui lui permettait de se déplacer seul, avantage non négligeable étant donné l’agressivité de ce dernier. Enutrof l’avait dressé à l’attaque depuis des temps infinis et l’avait affublé du sobriquet ridicule de Fifi (Médor lui semblant un peu trop canin).

La déesse Sacrieur, sachant que les apparitions de Discordia se faisaient toujours en musique, envoya son épée dansante. Cette dernière nommée Abeur (épée à beurre, HAHA quelle comique cette Sacrieur …) n’était capable de parole qu’en présence de mélodie autour d’elle, ce qui en faisait une représentante parfaite pour l’occasion.

Iop quant à lui, une fois sa voix et sa mobilité retrouvées (ce qui avait pris quand même un certain temps) réfléchi à qui il pourrait charger de cette mission. N’ayant nulle capacité à générer des suivants ou alliés (quand on est un guerrier, on se bat seul et fièrement !), il ne pouvait invoquer un messager. A moins que … Fouillant dans sa salle d’armes personnelle, il en sortit un très vieux Poutch animé qui servait à ses disciples pour s’entrainer. Un souffle divin suffisait à le rendre bien plus agressif que ceux qu’on pouvait voir dans les Kanojedo du monde des 11 : ce Poutch là, nommé Taï Gueur, était le Poutch du dieu Iop, il se défendait et il attaquait !

Xelor avait hésité, envoyer un cadran ou une aiguille ne lui convenait pas, et il en avait besoin pour d’autres mises au point en ce moment. En soupirant, il jeta son dévolu sur sa femme de ménage (et ancienne nourrice, oui oui, même les dieux peuvent avoir des nourrices), une créature replète pour ne pas dire bouffie, aux jambes poilues et à l’accent étrange nommée Tata Rodriguez pour d’obscures raisons en rapport avec la pêche. Personne n’avait jamais vraiment bien compris pourquoi, et en fait, tout le monde s’en fichait.

Sadida n’eut pas trop à réfléchir quant à lui : il enverrait une Poupée bien évidemment, une Sacrifiée ferait l’affaire, puisqu’elle ne servirait plus à rien une fois son message délivré. Il lui accrocha lui-même le petit bandeau au rond rouge sur le front à l’aide de deux épingles et laissa Barb’Hi rejoindre ses camarades.

La déesse Feca n’avait personne sous la main et prit donc la première qu’elle rencontra en rentrant dans ses appartements, à savoir Rondache, sa forgeuse de boucliers céleste. Cette dernière parlait peu mais pour ce qu’il y avait à dire, ça irait très bien. Si d’aventure, elle cafouillait, elle pourrait toujours esquiver les conséquences de son mauvais choix à coup de bâton derrière un bouclier quelconque.

La déesse Eniripsa quant à elle, délégua son Lapino personnel. Blasé et un peu crétin, il affichait tour à tour un air résigné et ennuyé, suivi régulièrement par un sourire idiot accompagné de bonds frénétiques et hystériques. Il retombait ensuite dans une profonde prostration et ainsi de suite jusqu’à ce que quelqu’un l’achève.

Ce que comptait bien faire le dieu Ecaflip : il décida, de son côté, par pur esprit joueur, d’envoyer son chaton griffeur Félix (si Ecaflip était joueur, il manquait parfois d’imagination) dans le but de remplir la mission que tous s’étaient donnés mais également dans celui, moins glorieux mais bien plus drôle, d’égorger le lapino d’Eniripsa. Gloussant tout en faisant rouler un dé, il tapota la tête du matou et l’envoya devant la céleste machine à transmettre les voix.

La déesse Crâ avait donc toujours eu un souci de non-présence poitrinaire si l’on peut dire, elle avait, à cet effet, embauché depuis fort longtemps, une jeune femme charmante et qui avait le bon goût d’être encore plus plate qu’elle, elle serait l'instrument double de sa vengeance envers cette femelle trop "divinement pourvue". Les dieux aimaient ses formes? Elle allait leur en donner! Cette jeune femme du nom de Ouandair Bra travaillait d’arrache pied sur divers artefacts de rembourrages qui auraient pu avantager la déesse et lui permettre de porter des décolletés avantageux. Nombre de bouftous et créatures laineuses y avaient laissé leurs poils et les rembourrages de meupette avaient fini par avoir les faveurs de la déesse (l’île d’otomaï n’étant pas encore connue à cette époque par les habitants du monde des 11, mais les dieux eux, avaient accès à chaque parcelle de terre, bien évidemment).

Et Osamodas me direz vous ? Maitre incontesté des invocations, qui allait-il envoyer ? Allait-il confier la tache à un de ses dragons ? Un tofu ou un bouftou sur vitaminé dont seul lui avait le secret ? Non, rien de tout cela. Il venait de générer une nouvelle race qu’il avait envisagée de tester depuis un moment, c’était l’occasion. A grand renfort de gestes divins, il invoqua donc son dernier-né : l’Astrubwork Mage ! Cette créature avait apparemment des soucis de prononciation flagrants, mais Osamodas espérait qu’un peu d’entrainement dans la machine lui ferait du bien.


Une fois le briefing de leurs troupes faites, les dieux choisirent l’instant propice qui se trouva être en Maisial 129. Pourquoi cette date ma foi, parce que Maisial est le mois du renouveau, des fleurs et de Rosal, le mois de l’épanouissement des belles plantes également et ce qui allait suivre cadrait parfaitement avec ce clin d’œil : l’humour des dieux est parfois impénétrable … Ce fut ce moment aussi que choisit Discordia pour organiser son plus long récital (l’ineffable, l’ineffable …), sous les yeux adorateur et fidèles de quelques 400 disciples. Elle était d’une beauté parfaite, abasourdissant de charisme et de dévotion tous les présents, le spectacle promettait d’être le plus fantastique jamais donné, garant de la grandeur de la Dame et tremplin de sa victoire prochaine. Alors que sa voix de déesse s’élevait clairement et musicalement, envoutant déjà chacun des auditeurs, un chœur de voix éraillées, papotant entre elles et peu en harmonie les unes avec les autres lui coupa la parole. Le chœur fut précédé d’un bruit suraigu qui vrilla les tympans de tous :

ZZROUIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIZZZZ !!!

- Mais réglez donc ce truc !! On se croirait dans les limbes démoniques de Rushu !! hurla Abeur, le bruit infâme l’ayant presque ébréchée et émoussée.
- Ah ? J’ai rien entendu moi, commenta Taï Gueur le Punch, immunisé des bruits grâce à sa tête remplie de paille (toute ressemblance avec le dieu Iop ne serait pas totalement fortuite – Note de l’auteur)
- Un, deux ... Un, deux … On m’entend là ??? Vous croyez qu’on m’entend ? lança Morty.
- Mais oui aller finissons en, j’ai encore des bandelettes à étendre moi !! ronchonna Tata Rodriguez, les mains dans sa lessive.
- Manger ! grogna Fifi en claquant du couvercle.
- Pouvé pa kalmé le vil1 cha ? Je kroi kil va manjé le lap1 olol ! Articula avec difficulté l’Astrubwork, que personne n’écouta vu que personne ne comprenait ce qu’il disait et croyait que le larsen de la machine refaisait son apparition.

Sidérée, Discordia resta bouche bée, à écouter les caquetages de ces voix venant de nulle part et couvrant les accords de sa lyre qu’elle continuait à faire jouer malgré elle. Au milieu de halos lumineux venus d’on ne sait où, elle ouvrit et ferma la bouche comme un poisson hors de l’eau, privée pour la première foi de sa répartie légendaire, son angoisse allant grandissant.

- Meowwww, on va pas y passer la nuit, j’ai encore le lapino à égorger mwwoi ! miaula Félix, sa langue rose pointant entre ses dents acérées.
- TéGé noob ! Fo y alé aven kil se véner mdr, dit l’Astrubwork en frissonnant.

Et la triple malédiction tomba des 11 voix éraillées enfin vaguement en accord :

Discordia, pour t'être joué de notre œuvre nous te condamnons, pour chaque vérité que tu diras, une bêtise grossière tu ajouteras...

Se reprenant tant bien que mal, Discordia tenta de reprendre le fil de son récital comme si de rien n’était, mais la première malédiction était tombée et elle ne put que dire : "Mes fidèles amis, dit-elle, ce soir marque la fin de la froide saison nous allons donc forniquer comme des wabbits et repeupler ces champs".
L'assistance regarda La Dame, elle-même s'arrêta net, cherchant à comprendre ce qu'elle venait de dire. Se reprenant elle ajouta :
"Nous devons faire comprendre aux Protecteurs que nous sommes aptes à nous peler la peau contre l'écorce des arbres". Quelques rires gênés s'entendirent dans l'assistance, La Dame se retourna espérant trouver l'origine de cette voix, refusant d'accepter qu'elle ait pu dire cela.
Tentant de se raccrocher à sa lyre, elle entama quelques accords mais …

Discordia, tu prônes le désaccord, tu en seras toi-même la « fière » représentation. Discorde tu veux être, Zizanie et contradiction nous t’accordons d’être, fausseté de la voix faute des mots. Que ton chant de Vérité devienne chant de dissonance, que l’Accord devienne le Désaccord, quelque en soit l’instrument...

La stridence du son qui sortit de la lyre en fit hurler certains, un grincement de dents n’aurait fait pire. La Dame s’arrêta net. Affolée elle regarda les fidèles espérant trouver une personne lui dirait que tout ceci n'était qu'une blague. Elle débuta quelques vocalises qui finirent de tuer les tympans les plus fragiles de la foule. Le son était hideux.
- Je ne sais pas ce qui m'arrive mais je sais qu'on pourrait faire de bonnes salades avec ces herbes.
Les yeux de La Dame étaient apeurés, on y lisait un mélange de colère et de peur. Levant le visage au ciel, elle allait s’exprimer, le visage déformé par la rage.

Ce fut la dernière fois que les voix des onze se firent entendre, plus prégnantes que jamais (mais après un léger cafouillage cependant) :

- Discordia … Heuu comment maitresse Crâ ? Je vous ai mal entendue entre ce bruit et le Lapino qui piaille à cause des coups de griffes de Félix, tremblota Ouandair Bra.
- Coupe donc ce micro imbécile ! Le conseil divin a opté pour une énorme poitrine afin de briser sa beauté et l'harmonie de ses formes, mais MOI je dis que son décolleté doit être totalement disproportionné, gigantesque, monstrueux ! Que cette malédiction soit ma satisfaction personnelle et que même les dieux cessent de lui trouver des charmes ! On verra bien ce qui les fait le plus rire après ça, ma maigre … hum… inexistante … enfin, que ça les fasse rire quoi, allez, finissez en ! trancha-t-elle, un peu jalouse tout de même de ce qui allait suivre.
- Oui, oui, répondit elle, en évitant de dire à Crâ qu’elle n’avait pas trouvé comment couper l’émission durant son intervention. On reprend…
Et les onze voix s’élevèrent une dernière fois à l’unisson :

Discordia, orgueilleuse tu es, grotesque tu seras, désormais ta poitrine reflétera ton ego surdimensionné brisant ainsi ta grâce et ta beauté.

La transmission se termina dans une sorte de déflagration assourdie : Barb’Hi venait de se sacrifier dans une auto destruction prévue, suivie de quelques cris de colère des voix surprises. Ce fut tout.

L’assistance resta bouche bée. Grossière, dissonante et ... Plantureuse n’était pas un mot suffisamment exact pour décrire l’énormité de la poitrine que Crâ venait de lui « accorder ». Une espèce d’horreur de la nature, une anomalie non génétique comme seuls les dieux dans leur infini sadisme peuvent en créer, une avant scène tellement distendue que sur le coup, Discordia gita dangereusement, prête à être mammairement entrainée en avant. Les dieux n’avaient pas fait les choses à moitié, et plutôt 250 fois qu’une (en bonnets W s’il vous plait…) : l’apprentie déesse était brisée, le corps parfait de Schamel qu’elle hantait et avait embelli n’était plus qu’une poitrine grotesque et sur-développée, supportée difficilement par ses deux longues jambes encore parfaites.

Les rires fusèrent dans l'auditoire devant l'air grotesque et même effrayant de Discordia. Elle peinait à garder l'équilibre face a tant de chair bringuebalant sur son corps si svelte. Elle regarda la foule face à elle, elle lut dans leurs yeux les moqueries, la pitié et l’horreur doublée de l’écœurement. Elle n'était plus une divinité, même mineure, ni même une humaine, elle n'était plus qu'une paire de seins énormes et bouffis. Sa lyre tomba au sol, la Dame ne pourrait plus en jouer : sa poitrine dépassant trop largement l’arrondi que ses bras lui permettaient pour saisir correctement l’instrument ...

Ce fut son dernier récital.
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